Depuis la découverte de cellules cancéreuses sur mon col de l’utérus, je me sens très seule.
J’en ai parlé à mon chef, Ludovic. C’est le responsable du service. Si je suis absente pour aller à des rendez-vous médicaux, il doit savoir pourquoi. Alors je l’ai mis au courant, mais je lui ai demandé de garder ça pour lui. Je ne veux pas dramatiser avant même de savoir ce qu’il en est. Ce n’est peut-être rien du tout. Peut-être qu’ils vont me dire « Ah ben non, fausse alerte ! Il n’y a rien ! ». Ou alors ce n’est rien de grave. Inutile pour l’instant d’alarmer tout le monde.
Du coup la vie continue, les gens me parlent comme d’habitude, ils sont contents et papotent. Moi en attendant, je me pose de grosses questions existentielles.
La mort fait apparaître l’essentiel
Quand on pense qu’on a le temps, on fait des plans sur le long terme. Genre « bon, je vais faire ce boulot pendant un an ou deux, même si le poste ne me convient pas à 100%… Et puis je ferai une formation… Et dans cinq ans, j’écrirai enfin ce livre que je veux écrire depuis des années… ».
Sauf que quand on n’a pas le temps, tout d’un coup tout devient clair. L’essentiel nous apparaît. Les faits sont là, et l’urgence aussi.
La formation, pourquoi, au fait ? Ce boulot, est-ce que je veux vraiment le faire ? C’est le livre qu’il faut que j’écrive. Tout de suite. Déjà, ce blog. C’est un bon début.
J’ai toujours su que je devais écrire. C’est une de ces choses qu’on sait, tout simplement, sans savoir comment on les sait. Mais il y avait toujours quelque chose de plus urgent, de plus important, de plus immédiat à faire. À force d’avoir toujours autre chose à faire dans la vie, on passe à côté de sa raison d’être.
Or, c’est quoi ma raison d’être, hein ?
Ma raison d’être
J’ai toujours eu le sentiment d’avoir une mission à remplir sur cette Terre. Je suis là parce que j’ai une tâche à accomplir. C’est juste que je ne sais pas laquelle.
Quand j’étais plus jeune, ça m’obsédait. Je n’ai jamais été ambitieuse en termes d’argent, de réussite sociale ou de carrière. Par contre, j’étais très ambitieuse dans le sens où je voulais découvrir ma raison d’être et mener à bien ma mission. Je voulais changer le monde. Aider les gens. Laisser une marque positive sur cette planète.
Avec le temps, j’ai un peu laissé tomber.
Comme je n’arrivais pas à trouver, je me suis dit que si je faisais ce que me dit mon cœur, je finirais par y arriver naturellement.
Quand on fait ce qui coule spontanément de notre cœur, forcément on est soi-même, et forcément on finit par remplir sa mission. Pas besoin de la comprendre intellectuellement quand on la remplit à travers ses actions naturelles et spontanées.
Être ou ne pas être moi
Pendant un moment, j’ai été radicale dans l’application de cette méthode. Je faisais ce qui coulait naturellement de mon cœur. Je suivais mon intuition. J’étais moi, sans compromis.
Et puis je me suis fatiguée. Mon style de vie était trop inhabituel. Ça mettait les gens mal à l’aise. Mettre les gens mal à l’aise, quelle horreur ! L’une de mes plus grandes peurs !
J’ai commencé à rêver d’une petite vie normale. Je me voyais habiter dans un petit appart sympa, partir le matin pour aller à mon petit boulot sympa. Prendre un café avec quelques amis après le boulot. Bref, être une personne normale avec une vie normale.
Maintenant, j’ai exactement ça. J’ai ma petite maison sympa, un petit boulot sympa dans une entreprise sympa. Quelques amis sympas qui m’aiment et que j’aime, même si je les néglige régulièrement. Deux chats que j’adore, mes bébés. Et voilà. La petite personne normale avec sa petite vie normale.
Remise en question
Maintenant, je me pose toutes ces questions. Est-ce que c’est vraiment ça que je veux ? J’ai atteint mon but et voilà que je ne suis pas heureuse. Si c’était la fin de ma vie maintenant, est-ce que je serais satisfaite de la vie que j’ai eue ? Qu’est ce que je voudrais faire avant de mourir ? C’est quoi qui est vraiment important dans la vie ?
Parfois, je suis très triste.
D’autres fois, c’est la colère qui remonte.
Alors voilà c’est tout ?! Ça va être ça, ma vie ?! « Ci-gît Rosine, pleine de talent et de potentiel – sauf qu’elle en a pas fait grand chose. Et puis elle est morte ». Super !!!
Ça m’énerve ! Je ne veux pas mourir avant d’avoir fait quelque chose de ma vie. Quelque chose de significatif.
Peut-être que c’est juste mon égo qui parle. L’égo est programmé pour survivre. Il ne veut pas que mon corps physique meure, et il ne veut pas disparaître, lui non plus. L’idée de disparaître, comme ça, de ne plus exister, de n’avoir jamais rien fait de grand ou de bien, de n’avoir jamais été importante, que la Terre continue à tourner sans moi et que tout le monde continue sa vie sans que mon absence fasse aucune différence, c’est insupportable pour l’égo. C’est normal.
Pourtant, il y a autre chose derrière. Je le sens.
Le but de la vie
Ça vient de mon âme, qui veut s’exprimer. Je veux être moi.
Les jours où j’étais moi me manquent. Je ne suis pas ça, ce que je suis maintenant. Mon âme me parle, elle veut s’exprimer, elle veut être reflétée dans mon corps, dans mes actions.
C’est ça le but de la vie : c’est de prendre ce qu’on est, et de l’exprimer à travers notre corps et nos actions dans ce monde physique. Prendre notre essence divine et en faire une oeuvre humaine.
On est là pour exprimer notre divinité et lui donner forme dans le monde matériel. C’est comme un travail de traduction entre notre essence et notre vie humaine.
C’est notre vie toute entière qui est notre oeuvre d’art. Notre vie c’est nous. Notre vie doit être à l’image de notre âme.
Mon âme a besoin de s’exprimer, elle veut que je lui donne la parole.
Je me sens très seule et c’est triste mais c’est peut-être une bonne chose, aussi. Il y a des moments dans la vie qu’il faut vivre seul. Pour vraiment faire face à soi-même. Et faire face à la vérité.
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